Par Charles A. Corr, Ph.D.
La plupart d’entre nous pensent que nous faisons l’expérience du deuil seulement après le décès d’un proche. Mais le processus de deuil peut débuter longtemps avant le décès, pour vous comme pour la personne aimée. Dans sa forme la plus pure, la définition du deuil est la réaction à un décès.
Bien qu’ils puissent passer inaperçus, un certain nombre de petits deuils ou d’étapes ont lieu tout au long d’une période de maladie mortelle, comme la perte du rôle de personne productive, la perte de la force physique, la perte de l’indépendance ou la perte de l’habileté à communiquer. Alors que la personne malade vit une série de petits deuils, les gens près d’elle vivent une série parallèle de chagrins ou de petits deuils. La réaction à ces petits deuils est appelée anticipation du deuil, un terme souvent associé aux décès lents et anticipés.
Deuil anticipé
Dû au fait que la forme la plus connue de deuil est celle ayant lieu après un décès, plusieurs personnes ne comprennent pas ce que vous vivez lors des moments les plus difficiles de l’anticipation du deuil. Très peu de gens dans notre société sont habiles pour offrir du soutien aux membres de la famille avant le décès d’un proche. Par contre, l’anticipation du deuil est naturelle et une réponse saine à ce que vous vivez.
Il est possible qu’une femme dont le mari souffre de la maladie d’Alzheimer, anticipe son deuil en lien avec la perte de la capacité de son mari à subvenir aux besoins du couple et la perte de son compagnon. Elle peut aussi anticiper les étapes à venir comme la détérioration de sa santé et la compréhension que les rêves communs ne se réaliseront pas.
Malgré ces aspects douloureux, l’amour et l’attachement durant cette période peuvent quand même exister. Une personne peut à la fois anticiper un deuil et aimer. Les petits deuils occasionnent bien du chagrin, l’amour réaffirme la valeur de la relation qui subsiste. Bien qu’il souffre de la perte de sa vocation, un homme mourant du cancer peut encore chérir le temps qu’il lui reste avec sa famille.
Une femme qui anticipe les impacts de la maladie d’Alzheimer de son époux peut trouver du soutien dans sa présence physique et décider de tout faire pour l'aimer et prendre soin de lui jusqu’à son décès.
Ce que vous pouvez faire
Lorsqu’il est clair que les médecins ne peuvent plus sauver la vie d’une personne en phase terminale, nous entendons souvent : « Il n’y a rien de plus que nous puissions faire ». Bien que cela peut être vrai au sens médical, les gens qui prennent soin des malades peuvent minimiser les sources d’angoisse. Vous pouvez demander une assistance médicale pour pallier la douleur et offrir tous vos soins avec amour et tendresse – border la personne aimée, réarranger les oreillers, offrir un bol de soupe. Les gens qui veulent aider peuvent tout simplement être présents et ainsi atténuer les sentiments d’isolement et d’abandon qui sont le lot de plusieurs mourants.
Aider une personne mourante
Les professionnels en gestion du deuil ont défini quatre façons d’aider les personnes en phase terminale.
Elles sont rattachées aux dimensions de base de la vie :
Physiquement
Les soins physiques de bases sont souvent indispensables pour aider les gens en phase terminale. Les gens prenant soin des personnes aimées souffrant d’une maladie mortelle et qui les aident à être confortables au lit, à aller à la salle de bain, à boire et manger offrent des soins fondamentaux.
Psychologique
La sécurité personnelle est souvent une priorité pour les personnes qui sont conscientes du déclin de leurs facultés mentales. Les personnes alertes peuvent avoir besoin d’être rassurées dans leur autonomie en participant aux décisions à propos de leurs soins comme choisir leur nouvelle résidence. Même, prendre les décisions les plus minimes et symboliques comme choisir ce que nous portons ou mangeons peut être important.
Sociale
Au fur et à mesure que leurs énergies diminuent, les personnes mourantes peuvent avoir à décider qu’elles relations elles désirent poursuivre et lesquelles elles doivent abandonner peu à peu. Une personne mourante peut vouloir gérer les aspects juridiques concernant la protection de sa succession pour simplifier les tâches des personnes survivantes. Elle peut aussi préparer ses arrangements funéraires ou organiser d’autres éléments de sa vie. Ces simples gestes peuvent aider à maintenir un sentiment de contrôle.
Spirituelle
Souvent, les personnes approchant la fin de leur vie souhaitent donner un sens à cette dernière. À ce moment, développer ou réaffirmer leurs valeurs religieuses ou spirituelles peut être très important.
Prendre soin des accompagnateurs
De bons soins d’accompagnement de personnes en phase terminale doivent inclure la personne malade et les membres de la famille. Toutes les personnes impliquées vivent des émotions et nécessitent soutien et assistance pour combler leurs besoins dans ces moments difficiles. Les membres de la famille immédiate et les amis proches doivent avoir l’occasion de prendre part aux soins, puisque se sentir utile est presque toujours un de leurs besoins. Bien que les rôles puissent changer d’une personne à l’autre, le fait qu’une personne fait quelque chose lui permet de se sentir utile et peut l’aider à éviter les sentiments de culpabilité après le décès.
Il est très important pour les accompagnateurs donnant les soins à la maison d’éviter la surcharge de travail ou de responsabilités. Sinon, vous ne serez plus en mesure de prendre soin de la personne aimée ou de vous-même. Le rôle assumé par les accompagnateurs à la maison, en ce qui concerne les soins, devrait être approprié pour eux et dans les limites de leurs capacités. Les professionnels et les autres ressources externes peuvent aider les membres de la famille à définir et s'occuper des rôles les plus difficiles. Le but devrait être de faire ce qui est en notre pouvoir – pas plus que ce que nous sommes en mesure de faire – pour prendre soin des gens que nous aimons.
Dire au revoir
Savoir qu’un décès est imminent donne une occasion trop rare d’exprimer vos vrais sentiments à une personne importante dans votre vie. C’est l’occasion de dire merci, je t’aime, pardonne-moi comme je te pardonne et au revoir. Deuil et tristesse ne sont pas éliminés, mais ils peuvent avoir lieu sans complications dans la conscience que nous avons fait tout ce que nous avons pu pour la personne aimée.
À propos de l'auteur
Charles A. Corr Ph. D. est professeur émérite à la « Southern Illinois University » de Edwardsville et ancien président du conseil de l’« International Work Group on Death, Dying, and Bereavement ». Dr Corr a publié 22 livres et plus de 80 articles et chapitres à propos d’une grande variété de sujets entourant les décès